Epoque biblique


Ce n'est pas le seul développement économique, industriel ou social qui peut alimenter la vitalité d'un peuple. Il lui faut une vie spirituelle, il lui faut un folklore qui est l'expression de sa culture. Mais tout comme la langue, la danse folklorique hébraïque avait presqu'entièrement disparu.

Les études faites sur la "Tenakh" (la Bible) ont révélé que les anciens Juifs n'utilisaient pas moins de 11 racines hébraïques pour décrire la danse (tels que "chag", "mahol"). Le récit de David dansant devant l'arche (II, Samuel VI, 13-23) fait appel à 5 verbes différents pour désigner l'action de danser.

La danse juive était, avant tout, un acte social et se pratiquait uniquement dans un but de réjouissance. Chez les Assyriens, le verbe danser est associé à l'idée de se réjouir. De même en hébreu, "chag" signifie danse et fête. Un bel exemple en est donné dans le Psaume 30,12 : "Pour moi, tu as changé le deuil en une danse, tu dénoués mon sac et me ceignis d'allégresse" et dans Jérémie, XXXI, 4 et 12-13. Il n'y a d'ailleurs aucune référence dans la Bible à des danses de deuil ou de lamentations. On a pu distinguer plusieurs types de danses :
A. La danse sacrée ou religieuse : La danse pouvait être de caractère religieux et servait à la louange divine. Psaume 149, 1-3 : "Chantez à Yahvé un chant nouveau, louange à son nom par la danse". De même II, Samuel VI, 21 : "Par la vie de Yahvé, qui m'a préféré... pour m'instituer chef d'Israël, le peuple de Yahvé, je danserai devant Yahvé". Et encore Psaume 150,4 - Exode XXXII, 17-19 - I Rois XVIII, 25-29 - Psaume 26,6 - Psaume 68,5 & 25-26 - Isaïe XXX, 29-32b.
B. La danse extatique : La danse extatique procède de la danse culturelle (par exemple David dansant devant l'arche. II Samuel VI 13-23). Les auteurs sacrés signalent aussi l'existence de groupes de prophètes vivant ensemble et qui demandaient à la musique et à la gesticulation, une extase qui devenait contagieuse. Les gesticulations comportent des mouvements de circumambulation, giration, sautillement. Entré en transe, Saül va jusqu'à se déshabiller et tomber en catalepsie tout un jour et une nuit (I Samuel XIX, 20-24) (Ce fait est très semblable aux offices vaudous actuels). Cfr. I Samiel X, 5-7 & 10-13 - I Rois XXII, 10 & s. Cette tradition mystique s'est maintenue dans les confréries des derviches tourneurs.
C. La danse de victoire : C'est une danse réservée aux femmes. Ceci s'explique aisément : ce sont les femmes qui accueillent les hommes revenant du combat. Elles l'exécutent en signe de joie, de victoire, de louange et d'hommage aux valeureux guerriers. (Exode XV, 20-21 - Juges XI, 34 - I Samuel XVIII, 6-7 - Judith XV, 12-13). Exemple : I Samuel, XVIII, 6 : "A leur retour, quand David revint d'avoir tué le Philistin, les femmes sortirent de toutes les villes d'Israël au-devant du roi Saül pour chanter en dansant au son des tambourins, des cris d'allégresse et des sistres". Dans Ezéchiel VI, 11, on peut y voir une danse préparatoire au combat, mais cette interprétation est beaucoup moins évidente pour Juges VII, 16-22.
D. La danse des fêtes agricoles et pastorales : On pratiquait la danse au cours des nombreuses fêtes, telles la fête de la moisson, la fête de la tonte, etc... (Juges XXI, 19-23 signale une festivité agraire). Dans l'ancienne Israêl, chaque vignoble comprenait un endroit pour danser, exclusivement réservé aux femmes. Durant "Sukkoth" (la fête des Tabernacles), avaient lieu des processions; les participants agitaient des palmes et des branches de saule. Ces processions ont encore lieu actuellement dans les synagogues. Une danse au flambeaux, selon une source talmudique, était exécutée au Festival de l'Eau : "Les hommes pieux (chassidim) et les thaumaturges dansaient devant les prêtres, avec des torches dans leurs mainset récitaient devant eux des cantiques et des hymnes. Des lévites jouaient de la musique avec des lyres, des harpes, des cymbales, des trompettes et d'innombrables instruments de musique sur les 15 degrés descendant du parvis d'Israël au parvis des femmes". (Mishanah, Sukka, V.4). la célébration durait toute la nuit. A l'aube, au cours d'une cérémonie annoncée par le fracas des trompettes, de l'eau tirée de cruches très belles et très précieuses, était versée sur l'autel des offrandes.
E. La danse de mariage : Les mariages étaient toujours des occasions de se réjouir par la danse. L'Ancien Testament est discret sur ce genre de manifestation. Une seule allusion au "mahol" nuptial se trouve dans le Shir Hashirim (Cantique des Cantiques) VII, 1-2 : "Reviens, reviens Sulamite, reviens, reviens, que nous te regardions ! Pourquoi regardez-vous la Sulamite, dansant comme un double choeur ?" Mais les interprétations sont multiples et contradictoires. Pour les uns, ce n'est pas l'épouse qui danse. Pour les autres, au contraire, l'épouse sulamite danse nue ou presque. Les assistants la rappemme pour la contempler et en faire la description lyrique rituelle, tout comme dans le "wasf" des noces arabes. De toute façon, le sens de "la danse en un double choeur", parfois traduit "la danse des deux camps" n'est pas clair.
La danse jouait encore un grand rôle dans les cérémonies de fiançailles. Elles sont décrites dans la "Mishnah" (Ta'anit, IV, 8) : "Rabbi Simeon Ben Gamaliel disait qu'il n'y avait pas de fête comparable au 15 Ab (juillet-août) et à Yom Kippur (jour des Expiations). En effet, ces jours-là, les filles de Jérusalem sortaient, portant des habits blancs qu'elles avaient empruntés si bien qu'aucune ne devait avoir honte si elle n'en possédait pas. Et les filles de Jérusalem sortaient et dansaient en cercle dans les vignobles. Et que disaient-elles ? "Jeune homme, lève donc les yeux et contemple celle que tu vas choisir. N'aie pas de regard pour la beauté mais pour la famille, car la grâce est mensonge...". Les fiancées étaient choisies au cours de ces cérémonies.

Outre Marc VI, 22 (la fille de Hérodiade dansant devant Hérode), il n'est fait mention nul part ailleurs des danses lascives de style oriental pratiquées dans les palais des Rois dégénérés ou dans les campemanets de soldats. Ces danses, si elles ont existé chez les anciens Juifs, sont à classer dans la catégorie des danses érotiques.

De cette étude, il est permis de distinguer deux formations de danse :
A. La danse processionnelle : Par exmple Psaume 68, 25-26.
25. "On a vu tes processions, ô Dieu, les processions de mon Dieu, de mon roi, au sanctuaire.
26. les chantres marchaient devant, les musiciens derrière, les jeunes filles au milieu, battant du tambourin".
Et encore Isaïe XXX, 29-32b.
B. La danse en rond : Le mot "mahol" (danser) vient de la racine "hul" qui signifie tourner. Exemple : Psaume 26,6 : "Je tourne autour de ton autel, Yahvé".

On ne sait malheureusement pas assez de choses de la technique des danses bibliques. Dans Ezéchiel VI, 11, le danseur bat des mains et frappe du pied. la danse que David exécute autour de l'Arche d'Alliance (II Samuel VI, 13-23) est plus une gesticulation désordonnée qu'une danse comportant des figures harmonieuses. Néanmoins, la description faite nous permet de distinguer des mouvements de giration, de saltation et de sautillement. Dans I Rois XVIII, 25-29, les prophètes de Baal tournent autour de leur autel et "dansaient en pliant le genou". cette claudication est interprétée par certians exégètes comme un signe d'humiliation. La circumambulation de l'autel se pratiquait également en Arabie. Pour certaines danses, les danseurs portent des palmes, des branches de saule. Judith et ses compagnes tiennent des thyrses et sont courinnées d'olivier (Judith XV, 12-13). les danses étaient exécutées séparément par les femmes et les hommes. Les guerriers seuls se préparaient au combat par des danses de guerre. Tandis que les danses dans les vignobles ne se faisaient que par les femmes exclusivement (par exemple : Juges XXI, 19-23). "Alors la vierge prendra joie à la danse, jeunes et vieux seront heureux" (Jérémie XXXI, 12-12). Outre les battements de mains qui rythmaient la danse, les cris d'allégresse ou les chants, la musique était produite par la harpe, la flûte (la fmûte invite à la danse, cfr. Matthieu XI, 17, une des rares allusions à la danse dans le Nouveau testament), la cithare, la lyre, le cor, la trompette, les sistres, les cymbales, le tambourin.

En conclusion, la danse exprime l'allégresse culturelle. Elle sert d'action de grâces, de propitiation pour la fertilité, la fécondité, la victoire. On n'y découvre aucune trace de rituel magique (à l'opposé des danses égyptiennes, assyriennes, islamiques, etc...), c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'imitation, de simulacre, donc aussi pas de recours au masque.


LA DANSE ISRAELIENNE            DIVERS ISRAEL            DIVERS