La danse aujourd'hui en Israël


A. Formation de la danse israélienne.

Comment est-il possible qu'un folklore original puisse être créé au 20ème siècle, dans une civilisation technique, scientifique, industrielle, non mythique et qui assiste à la mort du folklore (et qui l'a peut être provoquée) ? La notion de folklore semble être liée à deux éléments au moins : l'attachement au passé d'abord, l'union étroite à une économie du type pastoral, agricole ou artisanale ensuite. Or aucun de ces deux éléments ne fait défaut en Israël.

Il ne faut pas oublier que les premiers pionniers ont dû consentir à quitter leur profession pour se transformer en paysan, en pêcheur, en soldat, en tractoriste. Ce retour profond aux symboles fondamentaux que sont la terre, l'eau, l'espace, la paix, a permis l'élaboration d'un folklore neuf. Si l'état d'Israël est, en effet, très jeune, il n'a pas moins de 2000 ans derrière lui. Car il n'y a pas eu de rupture totale avec le passé. Les Juifs de la Diaspora (= dispersion, par opposition aux Juifs "sabras", c'est-à-dire nés en Israël - le "sabra" est un cactus typiquement israélien qui porte des fleurs) ont conservé les traditions religieuses et les ont transmises à leurs enfants. D'autre part, la culture juive s'est transformée et enrichie au contact des différentes cultures où vécurent les Juifs.

Les danses israéliennes actuelles reflètent donc les diverses civilisations dans lesquelles les Juifs vécurent. On reconnaît trois grands apports dans la constitution de l'authentique folklore israélien :
1. L'apport étranger :
Les émigrés d'Europe centrale, qui étaient les plus nombreux et les plus riches en folklore, virent leur apport devenir la source d'inspiration principale du nouveau folklore. Le "horo" (danse en cercle) balkanique (Roumanie, Bulgarie) se transforma en "hora" israélienne. La hora est une danse collective sans complication ni figure spéciale, propre à extérioriser la joie de vivre de tous les jeunes (exemple : Hava Nagila, Hevenu Shalom Aleichem, David Melech Israël, etc... Toutefois certaines horas ont reçu, dans le suite, une forme plus complexe. Le "kolo" yougoslave (danse en chaîne) devint la "debka" (farandole) (exemple : Debka hachamor, Debka Dal'una, debka Rafiach, etc...)
2. La source biblique :
La Bible est la grande source d'inspiration des textes des chants et les danses y puisent l'esprit de leur chorégraphie : danse de supplication (Zemer Atik), danse de délivrance (Al tira avdei Yaacov), danse d'allégresse (Vai Nikehu dvash micella). Et y-a-t-il de plus beau poème d'amour que celui du "Shir Hashirim" (Cantique des Cantiques). Mises en musique, ces paroles de tendresse ont donné de délicieuses danses, telles que Dodi li (Mon bien-aimé est à moi), Dodi Dodi, Iti milvanon, El ginat egoz, Hana'ava babanot et tant d'autres.
3. L'élément yéménite :
Cependant, c'est l'influence yéménite qui a été la plus déterminante pour donner au folklore une empreinte spéciale et lui conférer son caractère spécifiquement israélien. Elle est due à l'immigration des Juifs du "Teman" (Yémen). Ce n'est pas une élite intellectuelle mais bien une paysannerie ignorante de la vie moderne, chez qui le folklore s'est transmis fidèlement dans la tradition la plus pure. Leurs chants et leurs danses très rythmès, accompagnés au "tof" (tambourin sans grelot), se mélèrent au folklore naissant. L'influence yéménite est caractérisée dans la chorégraphie par des mouvements très souples et harmonieux.

Il faudrait coter, en outre, les divers apports :
a) Des Juifs américains (qui ont introduit la formation en quadrille ainsi que des figures de round et square dance).
b) Des minorités ethniques arabes, bédouines, druzes dont les pas et les rythmes sont typiquement orientaux (par exemple la debka).
c) Des tcherkesses (ou circassiens). De religion mahométane, ils proviennent du sud-est de la Russie. A le recherche de la liberté religieuse, ils s'établirent en Palestine et en Syrie à la fin du 19ème siècle. Les Tcherkesses étaient d'excellents cavaliers.
d) Des Juifs allemands et polonais qui nous ont apporté des danses communautaires telles que Sher, Broiges Tanz, Potch Tanz, etc...
Désormais, le folklore n'est plus ni slave, ni balkanique, ni arabe, mais bien israélien.

B. Pratique de la danse.

La danse israélienne a vraiment acquis son originalité, mêlant le romantisme du retour en Israël avec les rythmes vigoureux du 20ème siècle. Il est assez normal que de nombreuses danses trouvent leur origine dans des thèmes bibliques depuis que le peuple juif vit à nouveau sur la terre des ancêtres et parce qu'il connaît, lui aussi, les joies et les peines que connurent leurs lointains prédécesseurs.

Aujourd'hui, la danse adhère à la vie de l'Israélien. Elle l'accompagne non seulement aux fêtes mais encore le soir, après le travail. Dans les "kibbutzim" (fermes collectives), les membres s'assemblent parfois autour d'un grand "medurah" (jeu de joie) pour chanter et danser ensemble. Le "Shabbath" (du vendredi soir au samedi soir), jour de repos, de joie et de paix, est encore une occasion de danser.

Les moissons, qui ont lieu trois fois par ans, à Pesach (Pâques), Shevuot et Sukkot, sont des thèmes pour les nouveaux chorégraphes pour exprimer la joie de voir le sol produire du fruit. A ces fêtes traditionnelles, les Israéliens ont ajouté de nouveaux festivals : le festival Omer, la fête du vin et la fête de la tonte. L'anniversaire de l'indépendance d'Israël est fêté dans tout le pays par de grandes manifestations populaires : processions dansantes, jeux scéniques, défilés, etc... L'immense besoin d'eau que réclame les terres arides, les efforts de reboismeent dans les terrains en jachère, l'amour du sol : tout cela se retrouve dans de nombreuses danses (Mayim, Bona habanot, Lech lamidbar, etc...). La volonté de sauvegarder Israël et de la défendre, a trouvé également un moyen d'expression dans la chorégraphie (Ken yovdu).

C'est un folklore vivant. Chaque événement donne lieu à de nouveaux chants. Ainsi, quelques jours après la victoire du Sinaï (remportée sur les Egyptiens par le général Moshe Dayan, le 5 novembre 1956), la radio israélienne présentait un nouvel hymne "Shir hasinaï" (le chant du Sinaï). Lorsque le village Dimona fut créé, on raconta son histoire dans le chant "Het simona mi Dimona".

La danse suit cette perpétuelle rénovation. Hava Nagila, d'abord exécutée en hora sur un tempo rapide, est transformée en danse par couple sur un tempo plus lent et plus nuancé. D'autres danses s'enrichissent aussi de plusieurs versions. Les chorégraphes créent des danses sur des mélodies folkloriques, des chants nouveaux. Les membres des Kibbutzim participent eux-mêmes à cet effort de création et d'invention (Im ba'arazim par exemple a été créé par un village de la vallée de l'Ezdraelon). Le groupe "Nachal" (branche de l'armée israélienne qui suit un programme de développement agricole) a composé la danse "Lech lamidbar" (viens au désert) qui invite la jeunesse à venir exploiter le désert.

Parmi les chorégraphes, citons au moins Rivkah Sturman, Shalom Hermon, Sara Levi, Dvora Lapson, Gurit Kadman, Lea Bergstein, Zev Havazeleth. Signalons encore quelques grandes troupes qui ont présenté, avec énormément de talent, leur folklore à l'étranger : le ballet folklorique Aloomim dirigé par Uri Shauli, la troupe israélienne Oranim Zabar avec Geula Gill dirigée par Dov Seltzer, les chanteurs et danseurs folkloriques israéliens Karmon dirigés par Jonathan Karmon, le théâtre-ballet israélien Inbal dirigé par Sara Levi qui se distingué lors de l'Exposition universelle de Bruxelles en 1958 et spécialisé en folklore yéménite, le groupe folklorique de l'université de Jérusalem, etc...


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