Chants et Danses Populaires en Espagne

INTRO
CHANTSDANSES
LES CHANSONS DU BERCEAU
LES CHANSONS ET LES JEUX D'ENFANTS
LES CHANSONS DE RONDA
LES CHANSONS DU TRAVAIL
ASTURIANADAS ET ALALAS
LES CHANSONS ET LA DANSE
LES CHANTS DU MARIAGE
LES CHANTS RELIGIEUX
LES VILLANCICOS
LES CHANTS DE LA SEMAINE SAINTE
GOZOS ET CANTOS DE ROGATIVA
AUTRES CHANTS
LE CHANT FLAMENCO
DANSES RITUELLES
LES DANSES DE DIVERTISSEMENT

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Introduction

     On reconnait habituellement que l'Espagne est un pays "divers, hétérogène et multiple". On fonde ce jugement sur la géographie, sur le sol, sur les habitants, sur la culture et les coutumes. Cette affirmation, bien qu'elle ne soit que partiellement juste, est acceptée d'emblée par le voyageur qui visite quelques provinces et observe la vie et le comportement des Espagnols. Tout aussi concordant est le jugement des visiteurs qui, à la suite d'un séjour en Espagne, publient leurs impressions et leurs mémoires. Ils concluent que "l'Espagne est un pays de forts contrastes" et "d'une complexe unité".
     L'anthropologie, l'histoire et la géographie confirment ce singulier phénomène qu'est la diversité de la population, des moeurs et de la culture. Dès les temps préhistoriques, où le peuple espagnol commence à se former, apparaissent des races et des civilisations variées. Du nord et du sud, des peuples affluent dans la péninsule. Les uns proviennent d'Europe, les autres d'Afrique. Au long des époques primitives et encore bien avant dans l'époqie historique, races et pueples, simultanément ou successivement, se fixent en Espagne et, tout en modelant un nouveau type humain et de nouvelles civilisations, ils gardent la marque de leurs différentes provenances, bien qu'ils soient tous originaires de l'Asie. On peut distinguer approximativement 14 groupes ethniques dans la masse des envahisseurs. Tous contribuèrent à la formation du peuple espagnol, de sa culture, de ses coutumes et de ses traditions, mais dans une proportion inégale et en fonction des territoires qu'ils occupaient. Le relief où dominent les hauts plateaux et les montagnes abruptes, isola les populations et les civilisations. De tels facteurs devaient forcément défavoriser la variété et la complexité des caractères ethniques et des civilisations. Le folklore devait lui-même accuser de telles particularités et plus particulièrement les formes où se manifestent le plus vivement le génie d'un peuple : le chant et la danse.

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Le Chant

     On croit souvent, surtout hord d'Espagne, que ce que l'on appelle le flamenco et les chants qui en dérivent caractériseraient, presqu'à l'exclusion de tout autre, le chant populaire espagnol. Il nous fait ici préciser à ce sujet : "C'est là un étrange paradoxe, car aucun art ne reflète mieux la pluralité et la diversité du génie espagnol que les chants et les danses de son folklore".
     Sans doute l'art flamenco contient-il, dans ses 2 formes d'expression, les plus hautes valeurs. Tantôt la force suggestive de ses manifestations pathétiques, tantôt ses sortilèges fascinants et sa joie fulgurante, toujours la singularité de son style et de sa technique en font l'art le plus original et la plus belle musique du monde (N.D.L.R. Après la musique roumaine, bien sûr...). Mais il convient de préciser ces affirmations : 1° Le folklore flamenco appartient à une seule région de l'Espagne : l'Andalouise. 2° C'est un folklore réservé aux initiés, domaine exclusif de quelques chanteurs, danseurs et guitaristes doués des facultés exceptionnelles qu'exigent son exécution et son interprétation. 3° L'Andalousie possède aussi un riche fond de chants et de danses espagnols, indépendants du flamenco et familiers à tous les Andalous. 4° Dans les autres provinces espagnoles, il y a une telle floraison que l'on a catalogué une douzaine de milliers de chants et plus de 1.500 sortes de danses. Trésor considérable et qui offre une telle diversité mélodique, esthétique, rythmique et stylistique qu'il est à peu près sans rival en Europe.
     Si l'on considère plus spécialement le chant, il est facile de prouver la puissance créatrice de l'Espagne dans ce domaine. Malgré l'influence regrettable mais sans cesse envahissante de la culture des villes dans les campagnes, au détriment des coutumes et des traditions villageoises, on trouve aisément des contrées où abondent les chants les plus vivants, les plus capables de satisfaire les chercheurs qui s'intéressent à l'expression du savoir et du sentiment populaires. On pourra visiter des hameaux et des villages dont le répertoire comporte jusqu'à 140 chants des plus variés. Nombreux sont les paysans capables d'interpréter une trentaine de chansons et il est courant d'entendre, sir un même thèmes, 10 ou 15 interprétations distinctes. Il n'est pas rare de trouver, dans certains villages situés à 3 ou 5 kilomètres les uns des autres, des répertoires dont les thèmes sont d'une inspiration presque totalement opposés. Il est inutile de souligner les proportions que prend un tel phénomène quand il s'agit de régions entières. Ces brèves remarques permettront d'imaginer facilement la richesse du chant traditionnel en Espagne. Or, on note des faits semblables quand on étudie la danse.
     Comme il arrive chez les autres peuples européens de haute civilisation, la chanson populaire espagnole reflète les coutumes, les actes et les besoins de la vie humaine, sociale et familiale des collectivités rurales. Elle ne remplit naturellement pas le même rôle dans toutes les régions. Elle dépend du milieu et de la culture dominante. Dans notre bref exposé, nous nous abstiendrons de délimiter et de localiser le folklore de la chanson car nous serions obligés de nous étendre à l'excès. Ce que nous indiquerons sera valable pour les répertoires de toutes les provinces de la Péninsule.

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Les Chansons du Berceau

     Les termes nana, orroró, berçe, arrolo, de cuna, de bressol, lo-kantak et anada désignent, dans les diverses régions, les chants avec lesquels les mère font taire, bercent et endorment les petits enfants. Elles les chantenrt à mi-voix en balançant le berceau où le bébé repose ou quand elles le tiennent sur leur sein pour l'endormir. Comme beaucoup d'autres chansond dont l'objet est différent, celles du berceau sont musicalement très variées. Elles se présentent fréquemment sous la forme d'un couplet de 4 phrases ou davantage, auquel s'ajoute, parfois, un court refrain. La ligne mélodique peut être "d'une seconde" (2 notes qui se suivent) et, partant de là, on trouve des exemple qui débordent l'octave. Du point de vue de la tonalité, elles se déroulent dans des mesures variées. Les diatoniques classiques et le chromatisme oriental sont représentés ainsi que les modes majeur et mineur. Parfois ils s'entremêlent curieusement. Le rythme obéit très souvent à une cadence de 2 temps que détermine le mouvement de va et vient du berceau mais nombreuses sont aussi les chansons qui combinent diverses mesures ou celles qui, sans souci de la cadence, se déroulent librement au gré de l'inspiration et du sentiment. Aussi peut on assurer que ces chansons sont habituellement caractérisées par la paisible fluidité de la ligne mélodique, par le "tempo" modéré et par la tendre et douce poésie qu'elles exhalent.

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Les Chansons et les Jeux d'Enfants

     Le répertoire de ces chansons est vaste. Des centaines d'entre elles, à travers villes et villages d'Espagne, restent bien vivantes. Les plus nombreuses sont celles dont les petites filles s'accompagnent pour faire la ronde ou sauter à la corde. Ce sont des romances des temps anciens, historiettes ou légendes qui content les amours et les aventures des rois et des princesses ou encore qui relatent les miracles de la Vierge et des Saints. Courtes, naïves et pittoresque, elles sont composées sur des thèmes variés où le mouvement des strophes est lié à celui du jeu. D'autre servent à ébaucher des mimes ou interviennent souvent quelques pas et figures de danses faciles. Le style musical de ces chansons est constamment - comme il convient au tempéramment et au caractère des enfants - simple et allègre, folâtre et animé. Le ton majeur, clair et optimiste, la mesure de 2 et 3 temps dans une simple combinaison y dominent. Le déroulement mélodique, bien que d'une forme très variée, est très régulier, avec des effets de symétrie dans la phrase, qui contribuent à le rendre très harmonieux.

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Les Chansons de Ronda

     Il ne fait aucun doute que l'amour, le sentiment humain par excellence, est la source des plus nombreuses et des plus diverses chansons. Il tient la plus grande place dans la chanson qui, dans beaucoup de provinces, porte le nom de "ronda". La ronda est essentiellement la promenade nocturne que les jeunes gens amoureux font à travers les rues du village. Il l'accompagnent de chants et plus spécialementlorsqu'ils s'arrêtent sous les fenêtres de leurs fiancées ou de leur "belles" pour qui, essentiellement aussi, ils font la "ronda". Le même mot désigne donc, à la fois, le groupe des jeunes promeneurs et le chant lui-même, sorte de sérénade. cette coutume est surtout observée les veilles des fêtes et les nuits qui les suivent. Dans bien des endroits, le groupe d'amoureux qui fait la "ronda" ne tolère pas la présence de rivaux et, au moment de passer dans la rue, ils lancent des menaces ou des couplets de défi.
     Parfois le signe de défi est un cri aigu et soutenu qui s'achève sur des notes vite descendantes et que l'on appelle, en castille, relinchido car il offre une certaine analogie avec le hennissement du cheval. Si, dans la rue de la "ronda", se présentent d'autres jeunes chanteurs qui osent relever le défi, ils répondent à la provocation par des couplets tout aussi provocants et au relinchido par des cris tout aussi forts. Les amoureux, fiers et susceptibles, s'affrontent dans une lutte ouverte qui ne se termine que sur la victoire de l'un des deux groupes et sur la fuite des vaincus. La "ronda" alors continue.
     Nous avons déjà dit que la chanson d'amour trouve, dans la "ronda", son terrain d'élection. C'est, pour les amoureux, le meilleur moyen d'exprimer à la bien-aimée, sur le mode lyrique, la passion et les sentiments que, dans leur timidité, ils n'oseraient pas manifester en tête-à-tête aussi sincèrement et aussi clairement. Les couplets de la "ronda" chantent non seulement les amours heureux mais aussi les souffrances de l'amour. Si les "rondas" qui expriment la galanterie, la déclaration tendre ou ardente de la passion sont nombreuses, bien d'autres traduisent les plaintes et les angoisses de l'amour incompris, les jalousies, les dépits, les railleries, les mépris et les haines.
     Musicalement, la chanson de la "ronda" ne présente aucun caractère morphologique qui la distingue des autres. Il est courant qu'elle emprunte une musique qui, sur d'autres paroles, s'appliquerait à des sujets distincts. La musique de certaines danses est souvent utilisée. Néanmoins, le plus souvent, elle est propre à la "ronda" et sert à cette seule fin. Les éléments de ce répertoire sont si divers qu'il serait fastidieux de les décrire en détail. Il suffit d'indiquer qu'il résume en lui les éléments qui se trouvent séparés dans les principaux genres du répertoire général.
     Nombreuses sont les chansons composées de strophes et d'un refrain mais ce dernier manque souvent. Le registre musical est habituellement large mais il arrive qu'il ne dépasse pas le tétracorde. Dans la plupart des cas, le couplet est composé de 2 phrases qui se répètent et le refrain, s'il y en a un, peut changer de forme ou bien adopter la musique des phrases déjà exprimées. Plus fréquemment, le couplet est fait de 4 phrases distinctes. La tonalité est riche en gammes qui se différencient entre elles. La mesure domine mais la rythmique est variée, bien que réapparaissent souvent les même formules. Mais nombreux sont aussi les chants, libres de toute mesure, et qui obéissent au caprice des interprètes. L'exécution est, selon les endroits, confiée à un seul chanteur (soliste) ou à un groupe (choral) ou aux deux (responsorial). Le ton est toujours élevé et énergique. Dans les provinces ou le fandango et la jota aragonaise sont employées comme chants de la "ronda", la guitare et même la mandoline servent à l'accompagnement.
     Le répertoire musical de la "ronda" possède des qualités expressives et esthétiques très accusées. Il enregistre toutes les nuances du sentiment et de l'émotion. Les airs sont parfois réalistes, presque toujours originaux, séduisants, émouvants et charmants. Quelques uns sont d'une inspiration élevée ou lyrique, fougueux ou virils, ou tristes et mélancoliques, d'autres sont voluptueux ou allègres et joyeux.
     Dans les villages de certaines régions, les jeunes gens ont l'habitude de faire aussi des "rondas" à l'aube des jours de fête. Cette coutume s'appelle naturellement echar o dar la alborada (donner une aubade). Le terme alborada ou selon les provinces, albadas ou albaes désignent les chansons qui correspondent à de telles "rondas". La note amoureuse y domine. Quant à la forme musicale - sauf esceptions que l'on rencontre dans la zone de Levante -, elle ne diffère pas essentiellement des "rondas" nocturnes ou des autres types. La musique est toujours souriante, d'une douceur qui convient à la poésue de l'aube.
     Les chansons de "rondas" sont aussi celles que les garçons du village chantent quand ils vont faire leur service militaire. On les appelle naturellement les chansons des conscrits. Six ou huit jours avant le départ, les recrues font des "rondas" nocturnes. Les couplets rappellent et réaffirment leur amour pour les jeunes filles qu'ils ont élues. Le coeur empli de tristesse, ils prennent congé d'elles et de leur village natal. Mais il en est de joyeux et d'insouciants.
     L'élément musical est propre à ce genre de "rondas".
     Dans les villes de certains provinces, on note l'existence d'un autre type. Ce sont les "rondas" qu'à l'occasion des grandes fêtes, des romerias ou encore du carnaval, les filles et les garçons organisent pour se divertir et manifester leur allégresse. En groupe, bras dessus-dessous, ils vont et viennent dans les rues du village, entonnant à pleine voix les chansons de "rondas" qui correspondent au moment. Ils s'arrêtent aux portes des parents et amis à qui ils dédient leurs chants et ils ne cessent que lorsqu'on leur a offert du vin et des gâteaux qu'ils savourent parmi les cris et les plaisanteries. Là aussi prévaut l'inspiration amoureuse, mais il arrive que les thèmes traitent de la fête du jour ou de quelqu'autre sujet. Ces "rondas" offrent les même caractères que les précédentes.

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Les Chansons du travail

     En Espagne, comme partour au monde, les chants qui sont liés aux travaux quotidiens ont une grande importance. Ils distraient les paysans de leur dur labeur et apparaissent même dans l'exercice des métiers les plus humbles à la campagne comme dans les villages des pêcheurs. Il y a des chansons pour bêcher, pour émotter, pour labourer et semer, pour sarcler et serfouir les semailles, pour moissonner, glaner, battre le blé et l'exposer à l'air, pour transporter le grain dans les greniers, pour vendanger et fouler le raisin, pour cueillir les olives, les piments et les feuilles de mûriers pour le ver à soie, pour écosser certains légumes et décortiquer le maïs, pour filer la laine, pour espader le lin et broyer le chanvre, pour bluter et pétrir la farine; il yna des chansons des bergers, des tondeurs, des meuniers, des bouviers, des charretiers, des muletiers, des pêcheurs, des marins, des carriers, des plâtriers, des charbonniers... Le but est toujours de rendre réguliers les mouvements et les gestes des travailleurs pour diminuer leur fatique physique et améliorer leur rendement. On sait que cette coutume est si ancienne et si universelle que le sociologue allemand Karl Bücher établit une théorie démontrant que la musique naquit du rythme du travail. Un grand nombre de chansons, qui appartiennent au répertoire dont nous parlons, ont une structure et un rythme adaptés aux mouvements qu'il faut accomplir pour réaliser la tâche entreprise. Naguère encore, dans certains contrées du Nord, on faisait venir des chanteurs professionnels, là où l'on se livrait à des travaux collectifs pour que, au son de leur rengaine, les ouvriers puissent supporter mieux la lassitude et produire davantage. parmi les carriers de Galice, il y en avait habituellement un aui avait une plus belle voix et un sens plus vif du rythme, que ses compagnons. On le chargeait d'entonner les chansona ppropriées pour indiquer quand les ouvriers devaient, d'un emême effort, pousser les gros blocs de pierre. On donnait à cet ouvrier un salaire plus élevé qu'à ses camarades. Dans le répertoire espagnol des chansons du travail, on note de nombreux airs dont les propriétés et les fins sont distinctes. Le rythme en est absolument libre, presque toutes offrent autant de variantes qu'il y a d'interprètes, elles ne sont généralement pas accompagnées, ce qui contredit la thèse de Bücher, citée plus haut. Ces chants sont, d'une façon générale, liés aux travaux de la campagne : le labourage, les moissons, le battage. Deux phrases musicales, qui se répètent avec les derniers vers du couplet, composent souvent ces chansons; parfois, il y a 4 phrases qui diffèrent les unes des autres ou encore les combinaisons a, a, b, a: a, b, c, b; a, b, a, b, c, a, b, et bien d'autres d'un type moins courant. Le refrain manque presque toujours. Les modes majeur et mineur ne sont employés que par exception. Dans ces chants de lointaine origine, dominent les anciennes modalités diatoniques et souvent celles qui, chromatiques ou non, ressemblent à certaines gammes orientales ou s'y identifient. Il est fréquent que ces chansons se terminent sur des vocalises plus ou moins prolongées et qu'elles se surchargent de notes rapides qui viennent les orner, ce qui leur donne une place privilégiée dans le folklore. Les paysans les utilisent pour se distraire de leur tâche ennuyeuse et pour en égayer la monotonie. Ils prétendent que les chants du labour ont une influence pour ainsi dire caressante sur les animaux, qu'ils modèrent leur allure et leur fait tracer bien droit les sillons. Chants calmes qui portent à la rêverie et aux sommeil, textes qui font allusion aux travaux, à la nature, à l'amour, d'une grande force de suggestion pour qui les entend de la bouche d'un paysan au teint hâlé, dans la tranquille lumière de la campagne aux larges horizons. Le lecteur pourra en juger par lui même avec la chanson des moissons que nous citons.

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Asturianadas et Alalas

     Au nord de la Péninsule, nous trouvons 2 types de chansons qui, sans entrer strictement dans le groupe des chants du travail, peuvent y être annexés car les paysans et les paysannes les entonnent pendant leur labeur ou le soir en rentrant à la ferme. On les cultive surtout dans les Asturies et en Galice sous le nom de asturianada et alala. L'asturianada se déroule toujours selon un rythme très libre et de vives fioritures ornent la musique qui habituellement construite sur le mode majeur (rarement sur le mineur) est très "harmonique", caractère fort rare dans les chants dont nous avons parlé jusqu'ici. Elle est plus allègre que les précédentes, bien qu'elle soit comme imprégnée d'une douce mélancolie qui s'harmonise avec le milieu brumeux, humide et verdoyant où elle s'épanouit. On l'entonne avec force que un diapason élevé, elle exprime les sentiments les plus variés, où dominent cependant les thèmes de l'amour, de la terre et de la nature.
     L'alala est peut-être le chant le plus intéressant que nous offre le riche répertoire de Galice et celui qui, musicalement, reflète le plus fidèlement le caractère paisible du peuple qui le pratique. Il semble remonter à une lointaine origine, comme d'ailleurs beaucoup d'éléments de la culture traditionnelle de la Galice, certainement la région la plus "archaïsante" d'Espagne. Cette ancienneté est attestée dans de nombreuses alalas qui sont formées seulement de 2 courtes phrases musicales, d'un rythme libre, qui sur un tempo fort lent, se limitent à prononcer les syllabes la la la lo, la la la... De là provient le nom de la chanson, dont nous ignorons encore la signification, à supposer qu'il faille en chercher une. A ces phrases psalmodiées, il arrive que l'on ajoute des textes intelligibles mais les syllabes sont reprises après le couplet littéraire. Certains types comportent des phrases plus nombreuses mais le rythme reste le même. Postérieures, mais pour la plupart fort anciennes, de nombreuses alalas apparaissent avec un plus large mouvement musical, une tonalité bien définie ou tant soit peu vague, mais qui peuvent être chantées car elles sont faites d'un texte poétique continu. Cependant le syllabisme est maintenu, l'air reste lent et, souvent, on conserve le la, la, la, en guise de ritournelle ou de refrain. Comme la asturianada, ces chants galiciens sont exécutés par des solistes, hommes ou femmes. Ils traduisent, avec beaucoup de vivacité, l'esprit et le sentiment de leurs créateurs et l'on y perçoit la subtile influence du milieu géographique, avec ses paysages et ses vallées toujours vertes, ses montagnes recouvertes de fleurs, son ciel enveloppé de brume. Aussi la musique de l'alala est elle toujours émouvante, nostalgique et d'une suave tristesse. Les couplets traduisent souvent les joies, les tendresses ou les peines de l'amour, le regret de la lointaine terre natale, ou les plaintes au moment de la quitter pour émigrer.

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Les Chansons et la Danse

     La danse, qui a toujours été le divertissement préféré des Espagnols, a fait naître un répertoire copieux et varié. Il y a encore peu de temps, on ne pouvait concevoir une fête officielle ou familiale sans que la danse fût au programme. Dans presque tous les villages, on dansait le dimanche et les jours fériés, sauf pendant le carême. On choisissait tantôt la place publique, tantôt un endroit dans la campagne proche de l'agglomération. Dans l'après-midi, garçons et filles se réunissaient et dansaient jusqu'au coucher du soleil. Là où l'on disposait de musiciens - joueur de cornemuse, de flûte, ou de tambourin -, la danse s'accompagnait naturellement d'un instrument mais là où l'on n'en trouvait pas, et c'était le cas dans de nombreux villages, les jeunes filles douées de la plus belle voix, chantaient alternativement au rythme du tambourin qu'elles tenaient dans leurs mains. C'est bien souvent la seule forme d'accompagnement musical connu et l'on en demandait point d'autre. Ces chansons étaient habituellement interprétées par des solistes et le sont encore car, bien qu'aujourd'hui, on ne célèbre plus ces danses populaires, on a encore coutume, dans de nombreuses villes et villages, de les tirer de l'oubli pour certaines fêtes locales, pour les romerias ou en des occasion solenelles. Un nombre considérable de danses comportent des chansons ordinairement accompagnées de la guitare, de la mandoline, du luth, du tambour basque ou du triangle. Cet ensemble instrumental est désigné, dans plusieurs provinces, sous le nom de rondalla. Un chanteur ou une chanteuse, ou l'un des musiciens entonne aussi, en soliste, les chants. Dans d'autres danses, ils sont interprétés par les danseurs qui, dans le même temps qu'ils exécutent leurs pas, forment un choeur, à une seule voix. Il arrive aussi que des spectateurs qui ne dansent pas, chantent par groupes qui alternent. Les thèmes musicaux de la chanson, adaptés à la danse, sont très divers. Dans le riche catalogue des couplets, nous trouvons des chansons amoureuses, sentimentales et lyriques, mais aussi des chansons allègres, comiques ou burlesques, ironiques ou satiriquess, insolentes même parfois et visant les danseurs, la danse elle-même, l'instruyment dont louent le chanteur ou la chanteuse et les petits faits quotidiens de la vie au village.
     En ce qui concerne la musique, le rythme très varié prend la forme les plus multiples. La chanson à 3 temps sur un air vif ou bien posé, se rencontre partout en Espagne et même dans les îles. Mais la structure est changeante, elle varie de caractère non seulement sous l'influence de la géographie ou de la psychologie des diverses provinces mais surtout parce qu'elle sert de contexture à des danses techniques et à des chorégraphies distinctes et mêmes opposées : a lo bajo, son llano, fandango, mateixa, jota, seguidillas, ball pla, folias, bolero, parranda et bien d'autres. Les plus simples de ces chants, composés d'un couplet et d'un refrain ou d'un seul couplet, offrent une grande variété de combinaisons dans la phrase mélodique, dans le rythme et la tonalité.
     Le fandango, la seguidilla, le bolero, la jota et quelques autres danses qui sont plus ou moins localisées, ont déjà des formes fixex et permanentes, plus larges et plus compliquées. Les instruments de rondalla que nous avons cités plus haut, accompagnent d'ordinaire ces chants qui sont liés aux danses du mêmenom. Le fandango comporte 6 phrases sur le mode majeur avec des modulations qui portent sur la dernière d'entre elles, avec accord majeur du 3ème degré qui est le ton - tonique andalouse - qu'adoptent les instruments dans le prélude et la ritournelle. Les cadences des 1ère, 3ème et 5ème phrases tombent harmoniquement dans le 1er degré, la 2ème dans le 4ème et la 4ème dans le 5ème ou dominante, chacune étant de 4 mesures. A part de rares exceptions, c'est la forme originelle du fandango, mais on doit remarquer que l'on donne aussi ce nom à certains chants de danse dans une structure différente. Les seguidillas comme le bolero, après une courte introduction instrumentale ont 3 ou 4 mesures de sortie chantée puis, après 3 mesures de refrain qu'exécutent seuls les musiciens, se développe le couplet de 9 mesures (il en est ainsi tout au moins pour les seguidillas d'Andalousie, celles de Castille, suivant en général cette règle, mais parfois la transgressent et comptent une mesure en plus ou en moins). Il est de rigeur de répéter 2 fois le refrain avec le couplet dans lequel les vers sont répartis d'une manière très particulière. Généralement le couplet comprend 4 phrases mais on en trouve de 5. Le mode majeur domine, néanmoins les seguidillas en mineur et sur d'autres tons ne sont pas rares. Le couplet de la jota (dela jota aragonaise et de ses semblables) est fait de 7 phrases de 4 mesures. Elle est précédée et suivie (en incluant le refrain quand il est présent) par des figurations mélodiques instrumentales d'introduction et de ritournelle. Le mode majeur est habituel, le mode mineur très rarement apparaît. Le régime harmonique est exclusivement de tonique et de dominante à chacune des 4 mesures dont son faites, comme nous l'avons déjà dit, chaque phrase. Dans l'accord tonique tombent les cadences des impaires, dans celui de la dominante les cadences des paires. Comme il arrive pour le fandango, dans d'autres provinces, on appelle aussi jotas des chansons chorégraphiques de construction distincte.
     Dans le copieux répertoire de musique de danses de métrique ternaire que possède l'Espagne, surabondent les plus belles formes. Certaines jouissent, depuis le 18ème siècle, d'une renommée universelle, qu'elles gardent encore de nos jours. Beaucoup de ces chants sont d'une très grande originalité de facture et de style musical. Ils expriment les nuances les plus variées et les plus séduisantes. Les uns sont vifs, dynamiques et joyeux, les autres conjugent la vivacité avec des accents et des chutes qui laissent trabsparaître la mélancolie, d'autres, comme les jotas sont viriles, superbes et triomphales; ailleurs dominent la naïveté et la sérénité; le fandango est presque toujours chargé d'émotions car, bien qu'il prétende à la gaieté (un couplet de fandango commence ainsi : "Vive le joyeux fandango !"), un subtil sentiment de tristesse imprègne ses cadences gutturales; les seguidillas expriment sans réserve la joie et l'allégresse les plus claires et les plus enthousiastes mais sans effet strident; la grâce parfois moqueuse est aussi un des attributs de sa musique charmante...
     La chanson pour la danse de mesure binaire, à 2 temps, est très commune dans la plus grande partie des province du nord de la Péninsule, dans quelques unes qui sont situées plus bas et dans 3 ou 4 autres du centre-ouest. Elle n'existe presque pas dans le sud. Elle sert pour les danses qui, selon les régions, s'appellent agudillo ou a lo agudo, a lo ligero ou a lo alto, arin-arin ou parrusalda, corranda, xiringuelo, giraldilla, de pandero, corrido charro, charrada..., danses qui, à l'exception du agudillo et de ses synonymes de la porrusalda ou arin-arin, s'accompagnent de musique de mesure différente. Presque toutes ces chansons de style binaire sont caractérisées par la vivacité souvent très grande de leur air, ce qui donne une allure sautillante, agitée et allègrebqu'accentue le son des tambours de basque qui les accompagnent. Par ailleurs, nous trouvons la même diversité de traits que nous avons notée pour les autres chansons dont nous vous avons parlé, variété dans la forme, dans le nombre et la combinaison des phrases, dans la tonalité, etc... seul le rythme musical atteste parfois une véritable originalité. Les courtes pièces que nous citons sont, dans l'ordre, un charro de la province de Zamora, un agudillo de celle de Santander, et un baile de pandero de Galice.
     Il y a encore une série de chansons pour la danse qui implique des types métriques et rythmiques distincts. En mesures de combinaison ternaire, de 6 x 8 avec 3 x 4, de 5 parties et jusqu'à 10 x 16 forment leurs structures respectives les muneiras et autres danses, certaines jotillas et sones, zortzicos, perantones, charradas, picadas, ruedas de Castilla...
     Très nombreuses sont les mélodiés liées aux danses que nous avons citées ou à celles, encore plus nombreuses, que nous n'avons pas nommées. Certaines, parmi ces dernières, ne comportent qu'une seule chanson, d'autres un certain nombre, et il en est qui en comptent des centaines. Nous voulons parler des seguidillas, de la jota, du fandango, ou des danses a lo alto, qui permettent au lecteur d'imaginer aisément la riche variété musicale et les multiples styles que compte le répertoire.

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Les Chants du Mariage

     Sans être aussi nombreux et sans occuper géographiquement un aussi grand espace, ils forment un groupe très suggestif qui évoque les actes et les coutumes rattachés à la célébration du mae. Ces coutumes varient selon les villes et les villages mais peuvent être identiques dans les provinces éloignées les unes des autres. Nous relaterons sommairement les plus importantes. Dans certains régions, la veille des noces, les jeunes filles amies de la fiancée vont, en pleine nuit, chanter devant sa porte la albora. Elles expriment, dans des couplets émouvants, les adieux qu'elles adressent à celle qui va se marier dans quelques heures, elles prodiguent les conseils que l'amitié leur inspire à celle qui abandonne le célibat pour se charger des responsabilités de l'épouse.
     La fiancée qui, de son lit, a entendu les chansons, descend et offre des gâteaux à ses amies qui rendent aussi visite au fiancé et aux parrains. Elles chantent, devant leurs portes, des coiplets quis ermonnent le premier et rendent hommage aux seconds.
     Ailleurs, c'est au moment où les promis se rendent à l'église ou à la sortie, quand le mariage est célébré, ou durant le repas de noces que les jeunes filles chantent des épithalames au texte très varié.
     Il est des endroits où, à la fin du banquet, les jeunes invitées présentent aux convives une pomme piquée à la pointe d'un long couteau et chantant sur un ton solennel, font le tour de la table en demandant à chacun de faire un don en argent pour la nouvelle mariée. Chaque assistant enfonce dans la pomme, une monnaie d'or ou d'argent et, quand il n'y a plus de place, on dépose la pomme sur un plateau et on en plante une autre à la pointe du couteau. La collecte termoinée, les quêteuses, chantant sur un autre ton, offrent à la jeune épouse, les pommes que garnissent les pièces de monnaie.
     Dans les villages de certains provinces, les jeunes gens qui n'ont pas été invités à la noce, se rassemblent devant la porte de la maison où se célèbre le banquet et, formant des choeurs séparés, chantent la louange des nouveaux mariés et de ceux qui les accompagnent, ainsi que les diverses cérémonies du mariage en exprimant leurs souhaits et félicitations. L'époux sort pour les remercier, leur offre de larges tranches de gâteaux et leur donne de l'argent pour qu'ils aillent boire dans les auberges...
     Si, dans ce répertoire, on note des chansons amusantes, celles d'un caratère sentimental et émouvant dominent le plus souvent et la musique est tant soit peu rigide et pour ainsi dire rituelle. Aussi bien quelques-unes de ces chansons appartiennent-elles à l'ordre du rite. Très peu comportent un refrain et la structure, le ton et le rythme varient comme dans celles que nous avons déjà étudiées.

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Les Chants religieux

     On relève la même diversité dans les chants qui s'inspirent du sentiment religieux. A l'église comme dans les processions, le peuple espagnol exprime fréquemment, par des chants, la profondeur devenue proverbiale de sa piété. Il célèbre ainsiNoël, la Passion et la Mort du Christ, les actes de dévotion en l'honneur sz Jésus et de sa divine Mère, en l'honneur aussi des Saints et Saintes, patrons du village et de tous les autres Saints et Vierges qui sont l'objet de la vénération locale. Il se sert du chant pour prier et implorer la protection du ciel quand il souffre sous le poids de tragiques infortunes.
     Nous répétons ici ce que nous avons écrit en d'autres occasions : "Ces chants consistent, presqu'à tout moment, à conter ou à rapporter l'événement. Les prières, les paroles de vénération, les louanges, quand on les trouve, sont brèves, elles sont placées au début ou à la fin du texte. Elles s'y insèrent parfois ou forment le refrain. Les divers moments de la naissance de l'enfant Jésus sont exposés en détail : l'Annonciation, les craintes de Saint-Joseph, les malheurs du couple à la recherche d'une auberge, la naissance, l'adoration des Rois Mages et des bergers, la fuite en Egypte, les premières aventures de Jésus, etc... Les textes qui se réfèrent à la Semaine Sainte se présentent sous la forme de romances, de calvarios, de couplets qui contient toute l'histoire des faits sacrés qui se sont déroulés du Dimanche des Rameaux à celui de Pâques. Dans les processions ou à l'église, on prie ou l'on célèbre les Vierges et les Saints en évoquant les apparitions, leurs souffrances, leurs martyres, leurs miracles, en bref toute leur vie. Ces chants sont parfois votifs, parfois ce sont des actions de grâce et alors ils rappellent les dangers que l'intervention du Saint a évités ou conjurés. Ils peuvent faire allusion aux offrandes, à leurs auteurs, au curé de la paroisse ou aux habitants du village. Les rogations dans les temps de sécheresse ou d'épidémies, se réfèrent parfois, avec des détails réalistes, aux dommages que le fléau a causés. Notre traditionnel répertoire religieux est essentiellement narratif. En racontant et en contemplant la vie et les miracles du Christ, de la Vierge et des Saints, le peuple traduit son émotion et croit ainsi mieux exprimer sa foi, son espérance et sa soumission à la Divinité".

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Les Villancicos

     La musique de ces chants diffère dans son caractère et dans ses aspect selon le motif qui les inspire. Les chants du cycle de la Nativité expriment une joie naïve et surtout ceux que l'on appelle les villancicos, d'une tradition qui remonte en Espagne au 15ème siècle, et qui était d'ailleurs aussi religieuse que profane. Le terme vient de villano (vilain) et il s'appliquait primitivement aux chansons villageoises - villanescas. Il s'accompagnaient du rythme des tambourins, des castagnettes, des triangles et de sorte de tambours faits avec des pots de terre. On les entonnait à l'Eglise, durant la messe du Coq ou devant les crèches que quelques maisons pouvaient installer. La tonalité, la composition et le rythme varient mais ils présentent presque constamment une strophe et une ritournelle et offrent une richesse musicale qui les met à part des autres chants.
     Les chants des ètrennes, de l'An neuf et des Rois, sans être religieux, présentent quelque analogie avec ceux que nous venons de citer, mais ils n'en ont pas la beauté et sont quelque peu bruyants. De Noël à l'Epiphanie, les enfants les entonnent dans les rues et de porte en porte en demandant des dons en argent et en nature.

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Les Chants de la Semaine Sainte

     Les chants du carême et de la Semaine Sainte sont bien différents. Le peuple, dans sa dévotion, ressent profondément la divine tragédie du Calvaire et le chant prend alors un accent sévère de la piété affligée et souvent le ton est lugubre et plaintif. Le récitatif revient avec insistance et presque toujours ces chants ont un caractère lithurgique et rituel.
     Mais c'est l'Andalousie qui offre le chant le plus chargé de force dramatique. On l'entend au cours de la Semaine Sainte quand les statues sacrées sont promenées dans les processions et on le connaît dans cette région sous le nom de saeta. La saeta, dans ses divers styles, est le chant le plus caractéristique du répertoire des fêtes religieuses. Il jaillit, toujours spontané et inattendu, de la bouche d'un seul homme ou d'une seule femme, perdus dans la foule et qui assiste à la procession. L'interprète est transporté par l'émotion qui le bouleverse au spectacle des scènes pathétiques ou des statues qui défilent sous ses yeux et qui lui rappellent la passion sublime et la mort du rédempteur. Angoissée et gémissante, la saeta s'accorde parfaitement avec l'Evénement funèbre et dramatique que vivent les divines Figures. Du point de vue formel, et sauf quelques rares exceptions, la saeta< est composée de 5 phrases musicales, le rythme est libre et la tonalité est, pour ainsi dire, vague car, en se référant aux saetas que le peuple appelle "anciennes", on voit qu'elles se déroulent toutes sur le pentacorde do-sol, avec une cadence en mi pour les phrases impaires et en fa pour les paires. Les saetas qui ne sont pas considérées comme anciennes débordent ce cadre, mais les caractères que nous avons cités, prévalent aussi en elles.

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Gozos et Cantos de Rogativa

     D'un caractère plus serein sont les chants qui, dans de nombreux villages, sont consacrés aux Saints et aux Saintes, qu'ils soient ou non patrons du lieu, quand vient le jour de leur fête. Ces chants sont si nombreux qu'il y a des régions, comme la Catalogne, où pour presque chaque martyr, confesseur ou vierge du calendrier, on conserve un ou plusieurs chants appropriés. On les appelle goigs ou gozos. C'est toujours la vie du Saint et les miracles qu'il a acoomplis qui font l'objet de ce genre très fécond dont la musique et le style sont d'une grande variété. On comparera des 2 chants suivants, le premier catalan et le second d'Estrémadure.
     D'une inspiration plus austère, mais appartenant au même domaine, sont les chants de rogations qui, fondamentalement, servent à demander la pluie. Les couplets en sont toujours expressifs et parfois naïfs.

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Autres chants

     Le répertoire traditionnel de l'Espagne s'enrichit encore de nombreux textes. Il existe de nombreux chants sans objet réel et que l'on entonne quand on entend se divertir. Il en est ainsi des romances, genre narratif, qui appartient, comme on le sait, à notre plus ancien folklore. Disons simplement que le romace, la cuarteta octosilabica et la de seguidilla dont le lecteur a pu apprécier divers échantillons dans cet écrit, sont les formes littéraires les plus typiques et les plus courantes du chant populaire espagnol. On peut aussi relever un nombre appréciable de belles et curieuse chansons de mars ou de mai qui se rattachent à des coutumes très intéressantes et sans aucun doute d'origine païenne? En moindre quantité sont les chansons de carnaval, de animas, para columpiar, baquicas, de pregones.

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Le chant Flamenco

     Avec l'avènement du disque, le chant flamenco a connu une large diffusion et rares sont les lecteurs qui n'en ont pas quelques notions. Ainsi la concisions dont nous sommes obligés de faire preuve aura-t-elle de moins fâcheuses conséquences.
     Selon les documents que nous possédons actuellement, il ne semble pas que ce chant ait donné signe de vie avant les dernières décades du 18ème siècle, et ce sont les gitans andalous qui, les premiers, l'ont mis en valeur. C'est pourquoi, vers le milieu du 19ème siècle, on le baptisa sous le nom de flamenco, terme qui désignait les gitans depuis la fin du 18ème siècle mais qui appartient aussi à l'argot des gueaux. Flamancia et flaman sont des paroles appartenant au langage de la gueuserie espagnole et qui servait pour qualifier, à la fois la présomption et le brillant et le splendide. On appliqua le mot dérivé flamenco aux gitans qui, apparemment, sont présomptueux de leur personne et qui se faisaient remarque (en espagnol lucir) dans leurs démarches, dans leurs manières et dans leurs gestes. C'est, en effet, à la fin du 18ème siècle que des ordonnances Royales interdirent aux gitans de continuer leur vie nomade et qu'ils se mirent à partager l'existence des gueux. On ne connaît actuellement aucune autre explication plus rationnelle de l'éthymologie du mot, ni poiyr quelle autre raison, il aurait été appliqué au gitan ou calé.
     A l'origine, les formes flamencas étaient limitées en nombre : martinetes, tonás, debla, polos, playeras, ou siguiriyas, et peut-être la cana. Avec les années et, comme le succès du flamenco s'étendait, on y incorpora graduellement de nouvelles formes qui sont parvenues jusqu'à nous : soleares, fandangos, malaguenas, serranas, alegrías, tarantas etc...
     L'étude méthodique et systématique du chant flamenco est récente et de nombreux problèmes qui le concernent ne sont pas encore élucidés. L'un, entr'autres, essentiel sur lequel on projette aujourd'hui une lueur est de découvrir ses premières otigines. Etant donné que kes gitans furent les premiers à le faire connaître, on pourrait croire qu'ils l'introduisirent en Espagne. Néanmoins, il semble désormais acquis que les choses ne se sont pas passées ainsi. Dans le répertoire strictement populaire, nous trouvons des formes et des thèmes qui s'identifient avec quelques uns de ces chants qui, pour avoir été les premiers à apparaître, sont considérés comme plus gitans ou plus flamenco : c'est le cas du martinete et de la siguiriya. Nous savons que le polo, avant de devenir un chant flamenco, était utilisé pour la danse dans kes milieux villageois, qu'il en était de même pour la cana. Ainsi les gitans - et ensuite ceux qui ne l'étaient pas - prirent au peuple espagnol des chansons que les plus doués d'entre eux flamenquisèrent pour en exploiter le succès. ce qui est arrivé ensuite avec le fandango, la malaguena, la saeta, las alegrias, corroborent ce phénomène car ces formes se rencontrent encore fort vivantes et largement diffusées à travers l'espagne, bien qu'elles prennent, en certains cas, des noms différents. Nous ne pouvons apporter la même preuve pour tous les chants de cette sorte car il nous manque encore le recueil folklorique de beaucoup de provinces. D'autre part, il n'est pas impossible qu'aient disparu de la tradition des chansons qui correspondaient à certains "styles" flamenco, ce qui rend désormais toute comparaison possible. En résumé, la technique qui permet de faire entrer un chant dans le groupe flamenco, consiste à ajouter, à la chanson choisie, des notes et des formes qui sont plus expressives que décoratives, à enrichir la version poétique de quelques mots ou bien encore à exprimer des soupirs et des plaintes, à répéter enfin dans certains chants une ou plusieurs phrases ou une partie de l'une d'entre elles. Afin que le lecteur puisse juger par lui-même de la métamorphose que nous avons décrite, nous donnons l'exemple d'une saeta très "flamenquisée" qui dérive de celle que nous avons citée précédemment dans toute sa pureté. Nous transcrivons la version flamenco dans sa tessiture exacte et telle que nous l'avons recueillie en phonogramme de la bouche du chanteur.
     Aux époques les plus primitives, il faut ramener les chants non rituels qui se trouvent disséminés à travers notre pays et qui, sur 3 ou 4 notes jointes, se composaient de 2 courtes phrases musicales obstinément répétées. On a retrouvé plus de 150 chansons de ce type et il est probable que l'on en découvrira bien d'autres encore.
     Quelques chants, presqu'exclusivement connus des provinces du nord de l'Espagne, sont originaires de peuples et de cultures qui, partis de l'Asie centrale au temps de la préhistoire, envahirent l'Europe dont les frontières méridionales devaient s'étendre jusqu'à la Péninsule ibérique. Une telle origine est attestée par la ressemblance entre ses chants et certains connus de peuples européens et asiatiques. C'est ainsi que certains chants du nord de l'Espagne sont probablement d'origine celtique car ils ont beaucoup d'analogie dans leur tour, leur musique et leur rythme avec des airs français de Bretagne ou de Normandie, de Flandres et d'Angleterre. Dans le secteur nord-ouest qu'occupèrent précisément les Celtes quand ils envahirent l'Espagne, on trouve de nombreuses danses de style binaire et d'un tempo très rapide que nous avons déjà mentionnées sous le nom de arin-arin, agudillo, a lo sito, charro, giraldilla, etc... Leur musique est étroitement apparentée à celle de la bourrée française, et même sur leplan chorégraphique le typique pas de bourrée si connu de la danse classique, fait partie des pas qui composent l'arin-arin des montagnes basco-navarraises et du charro que l'on danse dans quelques villages à l'ouest de la province de Zamora.
     Par le chemin de la Méditerranée et de l'Afrique, entrèrent certains formes et styles qui proviennent de l'Hindoustan ou d'autres régions limitrophes et dont l'on trouve la trace dans nos chansons. L'influence berbère, de son côté, se fait chaque jour plus visible, non seulement dans les chants qui reproduisent fidèlement les lignes de ceux que l'on retrouve chez les peuples de l'Atlas mais aussi dans le rythme particulier de certaines danses, rythme que nous découvrons ou croyons découvrir dans le folklore berbère. Nous songeons plus particulièrement au tango de Cadix et au quinaire (10 x 16) qui concerne principalement les ruedas de Burgos, les charradas picadas de Salamanca, et les corridos de Segovie, rythmes que l'on retrouve aussi dans la Turquie d'Asie.
     Nous remarquons aussi dans beaucoup de chansons appartenant aux genres les plus divers, la profonde influence exercée par le chant grégorien. On voit cette influence dans des chants qui accueillent totalement ou partiellement des formules lithurgiques du répertoire psalmodique, de l'hymnodique ou de l'antiphonaire.
     Bien du temps passera encore avant que l'on puisse mesurer exactement les influences que nous avons citéess, avant d'en découvrir de nouvelles, anciennes ou non, pour pouvoir, par l'analyse scientifique et la comparaison, faire un exposé exhaustif de la formation du répertoire traditionnel.

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La Danse

     La danse espagnole jouit d'une renommée universelle. Il en est peu qui la surpassent en puissance d'expression et de séduction, en originalité et en richesse du point de vue esthétique et psychologique. Mais on connaît moins la richesse de ces aspects car seules les plus brillantes et les plus spectaculaires sont proposées depuis le siècle dernier à l'admiration du public, à l'extérieur comme à l'intérieur de nos frontières.
     Aujourd'hui, néanmoins, grâce aux représentations données en Espagne et au dehors par les groupes régionaux, la connaissance de la danse espagnole s'est considérablement élargie.
     On sait que la passion pour la danses est enracinée depuis très longtemps dans l'âme du peuple espagnol. Des documents l'attestent même pour les temps antérieurs à l'époque néolithique. Des peintures rupestres du mésolithique et du néolithique représentent déjà des danses collectives exécutées tantôt par des femmes, tantôt par des hommes et que l'on interprète comme des danses magiques concernant la fécondité et la guerre. A l'époque historique, nous avons le témoignage des Grecs et des Romains ainsi que les figures que représentent des céramiques ibériques récemment découvertes et, non seulement la danse reste, à cette époque, l'objet de prédilection du peuple, mais son domaine s'est encore élargi. Elle n'est plus liée uniquement à la fécondité et à la guerre mais elle pénètre la religion, les fêtes, les cérémonies funèbres et le spectacle.
     On sait, dans ce dernier cas, de quel prestige jouissaient, à Rome, les danseuses de la Bétique. Elles charmaient, de leurs danses voluptueuses, les yeux et le coeur des Romains raffinés dans les réunions et les banquets. Les castagnettes commençaient déjà à accompagner les danses andalouses. A partir de cette période, nous avons des témoignages continus sur le développement des danses espagnoles.
     Etant donné une si longue tradition au cours de laquelle on voit se diversifier et s'enrichir les mêmes influences ethniques que nous avons signalées dans le chant, il n'est pas étonnant que les danses populaires soient si nombreuses, les formes aussi riches et aussi belles. Voici un ordre élémentaire qui les distinguent selon leur objet : a) Les danses que l'on exécute dans les actes religieux ou profanes, dans les fêtes et les cérémonies spéciales et qui leur confère un caractère solennel; b) les danses qui servent au divertissement et à la distraction, d'une pratique plus habituelle, celles des dimanches, des fêtes de société ou de famille.

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La Danse

     La danse espagnole jouit d'une renommée universelle. Il en est peu qui la surpassent en puissance d'expression et de séduction, en originalité et en richesse du point de vue esthétique et psychologique. Mais on connaît moins la richesse de ces aspects car seules les plus brillantes et les plus spectaculaires sont proposées depuis le siècle dernier à l'admiration du public, à l'extérieur comme à l'intérieur de nos frontières.
     Aujourd'hui, néanmoins, grâce aux représentations données en Espagne et au dehors par les groupes régionaux, la connaissance de la danse espagnole s'est considérablement élargie.
     On sait que la passion pour la danses est enracinée depuis très longtemps dans l'âme du peuple espagnol. Des documents l'attestent même pour les temps antérieurs à l'époque néolithique. Des peintures rupestres du mésolithique et du néolithique représentent déjà des danses collectives exécutées tantôt par des femmes, tantôt par des hommes et que l'on interprète comme des danses magiques concernant la fécondité et la guerre. A l'époque historique, nous avons le témoignage des Grecs et des Romains ainsi que les figures que représentent des céramiques ibériques récemment découvertes et, non seulement la danse reste, à cette époque, l'objet de prédilection du peuple, mais son domaine s'est encore élargi. Elle n'est plus liée uniquement à la fécondité et à la guerre mais elle pénètre la religion, les fêtes, les cérémonies funèbres et le spectacle.
     On sait, dans ce dernier cas, de quel prestige jouissaient, à Rome, les danseuses de la Bétique. Elles charmaient, de leurs danses voluptueuses, les yeux et le coeur des Romains raffinés dans les réunions et les banquets. Les castagnettes commençaient déjà à accompagner les danses andalouses. A partir de cette période, nous avons des témoignages continus sur le développement des danses espagnoles.
     Etant donné une si longue tradition au cours de laquelle on voit se diversifier et s'enrichir les mêmes influences ethniques que nous avons signalées dans le chant, il n'est pas étonnant que les danses populaires soient si nombreuses, les formes aussi riches et aussi belles. Voici un ordre élémentaire qui les distinguent selon leur objet : a) Les danses que l'on exécute dans les actes religieux ou profanes, dans les fêtes et les cérémonies spéciales et qui leur confère un caractère solennel; b) les danses qui servent au divertissement et à la distraction, d'une pratique plus habituelle, celles des dimanches, des fêtes de société ou de famille.

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Danses rituelles

     Nous les placerons en tête du 1er groupe. On les exécute devant les statues des Saints patron au cours des processions. La plus répandue en Espagne est celle que l'on nomme de paloteos ou de palos (bâtons). Des hommes, généralement au nombre de 8 et vêtus de blanc ou parfois, dans certains villages, portant des jupes ou des robes de la même couleur, manient, dans chaque main, de courts bâtons qu'ils entrechoquent les uns contre les autres. Ils suivent le rythme des instruments de musique et, parfois même, esquissent quelques pas de danse. Cette danse offre des quantités de combinaisons. Les manières de heurter les bâtons varient et, dans certains villages, elles dépassent la douzaine. Le "paloteo" peut varier dans chacune d'elles. On a, jusqu'ici, localisé ce genre de danses dans plus de 200 endroits. La plupart du temps, les paloteados sont de purs exercices d'habileté plus ou moins difficiles, violents ou compliqués mais, souvent, ils voilent une signification désormais perdue qui devrait être rattachée aux fins primitives de la danse comme la fécondité et le combat.
     La danse des épées survit dans de nombreuses provinces. Elle est, elle aussi, exécutée par 8 hommes habillés comme ceux que nous avons cités précédemment. Dans la main droite, ils tiennent leur arme et, de la gauche, ils saisissent la pointe de l'épée du compagnon qui est à leur côté. Ils évoluent au son de la musique, dessinant des figures en forme de spirales, de cercles ou de serpents et, tantôt, ils passent sous les épées après les avoir inclinées, tantôt, ils les élèvent pour faire une sorte de pont en passer dessous. Dans quelques villages, ils simulent un combat, dans certains autres, ils croisent leurs armes horizontalement et saisissent, par le cou, celui qui dirige la danse ou le bouffon; on appelle ce simulacre "la horca" (la potence). Dans d'autres encore, ils entrelacent les épées pour former une sorte de pavois sue lequel est hissé le bouffon ou un danseur qui se tient debout ou étendu comme s'il était mort. C'est évidemment, là, une survivance symbolique du rite primitif qui dut donner naissance, dans des temps très éloignés, à cette danse des épées. Selon certains chercheurs, il s'agirait d'un rite devant favoriser la poussée des plantes et, selon d'autres, d'un acte magique lié à la médecine et qui devait servir à guérir les maladies.
     Nous rencontrons aussi un type de danses des épées où les danseurs portent des boucliers qui sont fait de couvercles en bois, en fer ou simplement en fer blanc. De la main qui reste libre, on les tient par la poignée et, tandis que se déroule la danse, on fait s'entrechoquer l'épée et le bouclier.
     La danse des boucliers ou des broqueles, consiste, comme son nom l'indique, à tenir un bouclier dans chaque main. A côté de ces danses, il en figure d'autres où les exécutants déposent les épées, les bâtons et les boucliers et parfois, s'aidant des castagnettes, exéctent des pas et des mouvements très divers.
     En Catalogne, à Mallorque, et dans le Levant, on pratique fréquemment la danse des cavallets (petits chevaux). Les danseurs ont, entre les jambes, de petits chevaux en caryon et manient leur épée; ils se livrent à de gracieuses évolutions en maniant leurs arme et en la croisant avec celle de leurs compagnons dans un simulacre de combat.
     La danse du cordon ou des ceintures est connue dans de nombreux villages. On l'exécute autour d'un mât de 2 à 3 mètres de haut d'où pendent autant de ceintures de soie multicolores, qu'il y a de danseurs. ceux-ci, qui tiennent parfois, dans une main, des catagnettes, se saisissent chacun d'une ceinture et, par couples qui s'affrontent, tournent en formant la chaîne autour du pivot. Les ceintures forment, au fur et à mesure, une toile colorée qui se défait peu à peu lorsque les danseurs exécutent leurs pas en sens inverse.
     Dans d'assez nombreux villages du nord, on pratique la danse des arceaux. Ces accessoires sont généralement des baguettes recourbées en forme d'arcs et garnies de fleurs naturelles ou faites de papier de couleur. Chaque danseur porte une extrémité et tient les arceaux dressés en dessinant des pas spectaculaires avec des figures croisées, entrelacées ou diversement combinées. Cette danse s'exécute aussi avec des arceaux nus de tout ornement que l'on entrechoque dans un jeu vif et compliqué.
     La danse des échasses peut être contemplée, tous les ans, à Anguiano (province de Logrono), le jour de la fête. C'est l'une des plus remarquables qui soient. Huit hommes vêtus d'une chemise blanche, d'une sorte de gilet et d'une robe très ample, juchés sur des échasses à 20 centimètres du sol, jouent des castagnettes. Les mouvements, sauts ey e,jambées sont d'un rapidité et d'une violence surprenantes. Ces robustes danseurs font preuve d'une précision, d'un sens de l'équilibre et même de l'harmonie étonnants. Ce genre étrange, dont le monde n'offre que peu d'exemples, serait, au dire des connaisseurs, lié à la végétation et aux semailles.
     Le jour de la Saint-Jean, dans le village de alosno (province de Huelva), la danse des grelots accompagne la procession en l'honneur du saint. Elle est formée de 13 à 15 hommes qui ortent une chemise et des bas blancs ainsi qu'un petit mouchoir de couleur autour du cou. A la hauteur des chevilles, ils ont les pieds entourés de grlots. Au cours de la processions, ils exécutent de simples évolutions qu'ils entremêlent de pas d'une danse, la folia, accompagnée de castagnettes. Plus tard, dans l'église, il forment un cercle et exécutent ce qu'ils appellent las mudanzas. Il s'agit de tourner 12 fois autour du cercle formé, dans le sens ceontraire des aiguilles d'une montre, et d'employer, à chaque tour, un pas nouveau ou mudanzas. On termine abev la folia déjà citée. C'est, comme on peut s'en douter, une danse solitaire, non seulement parce qu'elle est célébrée le jour du solstice mais aussi parce que le cercle, les 12 tours et les 12 pas fifférents, symbolisent la course du soleil à travers les 12 mois de l'année ou les 12 signes du Zodiaque. C'est aussi un rite propitiatoire, bien que le village l'ignore. Cette danse est pratiquée en d'autres lieux en Espagne mais, nulle part ailleurs, elle ne révèle aussi clairement son origine.
     Dans le village de Piornal (province de Caceres), après la procession en l'honneur de Saint-Sébastien, les assistants font la danse du saint. Au son d'un tambour basque dont joue un personnage appelé el Jarrampla (un homme masqué et vêtu de blanc qui a suivi la procession à la suite d'un voeu, avec son tambour), les assistants, un à un, prenent dans leurs bras, la statuette du divin martyr et dansent quelques instants puis, ils reçoivent rituellement du jarrampla un léger coup qu'il leur donne avec sa baguette.
     Dans cette même province, certains villages célèbrent les danses processionnelles de la vaca moza. Six jeunes femmes ont revêtu leurs costumes typiques décorés d'écharpes et de mouchoirs aux diverses couleurs. L'une d'entre elles, appelée la Capitaine, porte une épée, 2 autres des hallebardes, on les appelle les hallebardières; les 2 qui les suivent dans la danse, tiennent des sabres et on les nomme des espantaperros (les "epouvante-chiens"), la dernière, la abanderada car elle porte, sur l'épaule, un drapeau (bandera). Les pas de la danse sont élémentaires. De temps en temps, les hallebardières jettent en l'air leur arme, la foule s'écarte des espantaperros qui agitent leur sabre comme un fouet et a abanderada s'agenouillant parfois devant la statue du saint que les porteurs ont déposé à terre, fait ondoyer le drapeau au rythme de la flûte et du tambour. Plus tard, quand la place est occupée par les villageois, les danseuses exécutent à nouveau leur danse solennelle puis... elles piquent et banderillent un brave jeune taureau que l'on a lâché; elle ne s'arrêtent que lorsqu'elles lui ont tranche les jarrets de leur sabre. On donne à la plus valeureuse, la queue et les oreille de l'animal (NDLR : Quelle barbarie...!)
     Nous citerons, sans les détailler, d'autres danses religueuses : les danses de diablos, de moros et cristianos, de las aguilas, de gitanas, de seises, picayos, serranas, indios, negros, del cura, et l'on pourrait encore en cataloguer une trentaine. Les danses qui s'exécutent dans les rues et sur les places à l'occasion de fêtes religieuses ou profanes, ateignent la mêmeproportion. Elles sont en apparence rituelle, mais, bien qu'on les pratique le jour de la fêtes des saints, elles ne leur sont pas consacrées.
     A Hontorio del Pinar (province de Burgos), on célèbre la danse del Mayo. Dans ce village, on appelle mayos les pins que, le 1er mai, les graçons plantent dans les rues. Dans l'après-midi du 1er jour de la fête, 6 jeunes filles, dans des vêtements typiques, visitent les mayos un par un. Elles les entourent et dansent au son des chansons que les graçons entonnent en s'accompagnat du tambour basque. En dessinant des pas gracieux et faciles, elles contournent l'arbre plusieurs fois, puis, formant des couples qui se font face, elles dansent une jota en hommage final. Au cours des fêtes de San-Juan-de-Alosno dont nous avons parlé plus haut, les jeunes gens plantent des pins dans les rues. Le pin est appelé el pirulito et, autour, garçons et filles exécutent la danse qui porte le même nom. Les 2 groupes tournent autour de l'arbre dans une danse facile scandée par le chant qu'entonnent les jeunes filles au son du tambour. Mais la chanson indique de quel côté il faut regarder et danseurs et danseuses tournent la tête dans la direction qui leur plaît. Si, en dansant, un garçon fait face à une jeune fille, on pense que c'est là un signe du destin et que les 2 jeunes gens doivent se marier. Cette danse est évidemment liée au mythe de la fécondité et à celui de l'amour. On rencontre de telles danses dans plusieurs provinces.
     La danse de corri-corri, qui s'exécute le jour de la Saint-Jean dans la mairie de Cabrales en Asturies, présente certaines analogies avec la précédente. Elle est accompagnée parfois d'une chanson et toujours d'un tambour basque ou d'un tambourin. Six jeunes filles en file se placent face à un homme. Elles tiennent, dans leurs mains, des rameaux de laurier ou d'une autre plante. Dans une pose hiératique et avec un pas simple, il veut les courtiser mais elles d'écartent de lui. Elles se rapprochent bientôt puis l'évitent à nouveau. Il les cherche encore mais le dédain se répète tandis que les danseurs tracent des figures géométriques en se portant d'un côté et de l'autre.
     Dans la mairie de Llanes, ville des Asturies, on danse le pericote pour les fêtes de San-Roque, de la Magdalena et de la Virgen de la Guia. Un homme et 2 femmes se font vis-à-vis. Elles jouent des castagnettes sur un rythme monotone et, persistant, tout en remuant leurs bras de bas en haut et de haut en bas. Sur un pas de va-et-vient, le danseur menace d'attaquer les jeunes filles et, subitement, mettant la main gauche derrière le dos et la main droite à la hauteur de l'épaule gauche, il fait un grand saut et tombe à côté des danseuses mais sans même les frôler puis, il revient en arrière et renouvelle les menaces. Il saute une seconde fois, mais passe alors entre les jeunes filles. La danse se déplace et l'on recommence les mêmes mouvements ou d'autres du même style. Un grande dignité, quasi religieuse, préside à cette danse, dont le caractère symbolique est indiscutable, sans que l'on puisse en déterminer la signification.
     En diverses circonstances, les danses laissent apparaître un caractère rituel ou significatif. Le mariage est souvent l'occasion de danses spéciales. Dans la province de Salamanque et avec un accompagnement de flûtes ou de tambourins, on danse la rosca de la noce. La rosca, qui est une grande couronne de pain ou un gâteau, est placée sur la table. Un habile danseur la contourne en dansant au son des castagnettes. Quand il a fini un tour, une jeune fille monte à son tour sur la table et lui fait face; tous deux dessinent une danse gracieuse autour du gâteau qui, à la fin, leur est offert en guise de récompense.
     Dans l'île d'Ibiza, après la noce, on exécute, en l'honneur des nouveaux époux, ses dotze rodades ou parfois ses nou rodades (les douze tours, les neuf tours). La danse est interprétée par un garçon et une fille. La jeune fille, qui retient sa jupe de la main gauche et qui a la droite à la hanche, exécute de très petits pas tandis que le danseur, les bras pendants et jouant des castagnettes, accomplit des mouvements très mesurés. De temps à autre, ils lèvent les avant-bras et joignant leurs coudes, ils glissent doucement durant quelques mesures tandis que les castagnettes cessent de se faire entendre. Dans les rodadas et principalement dans le nou (9), transparaît le symbolisme. Quand ils ont terminé, le nouveau marié danse la filera avec la mariée et 2 de ses amies qui se mettent en file, d'où le nom donné à la danse.
     A Castrillo de la Reina (province de Burgos), après le repas de noces, on danse la pita et le pon (la poule et le coq). Un garçon et une fille, accroupis, se font vis-à-vis. Les mains ramenées en arrière sur les jarrets, ils entonnent la chanson qui accompagnent la danse en sautillant sur la pointe des pieds. Le danseur essaie de se placer derrière la danseuse mais celle-ci, en faisant des bonds, cherche à l'en empêcher. Si l'un des deux tombe par suite de la fatigue ou du déséquilibre, l'autre l'imite et les 2 sont relevés, mis sur un siège et invités à boire un verre de vin sucré.

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Les Danses de divertissement

     Le lecteur a pu constater la grande diversité des danses rituelles en Espagne, de même que leur richesse puisqu'on en compte une centaine. Quand au second groupe où nous avons fait entrer les danses de divertissement, il est évidemment encore plus copieux. Ce genre, qui a presque journellement la faveur du public, s'est continuellement enrichi des nuances et des traits les plus variés; il exprime, de surcroît, des valeurs spirituelles et des sentiments qui apparaissaient atténués dans les danses dont nous venons de parler. La description que nous allons en faire sera générale.
     C'est au nord de la Péninsule que l'on rencontre le type le plus primitif de ces danses : les chorales en ronde. Des hommes et des femmes (mais parfois aussi des hommes seuls ou des femmes seules) se prennent par la main pour former un cercle (ronde fermée), chantent et dansent à tour de rôle ou bien sans fermer le cercle (ronde ouverte), ils marchent sur une ligne qui peut être courbe, droite ou plus ou moins ondulante. Les 2 formes sont représentées dans cette zone. Les Asturies possèdent la danse lente danza prima (ronde fermée ainsi qu'ouverte) et la giraldilla (ronde fermée) qu'elle partage avec la province de Léon. Au Pays Basque, el gizon-dantza ou aurresku, les sokas dantzas et la biribilketa ou karrika-sonu sont de bons exemples de rondes ouvertes. En catalogne, citons, parmi les rondes fermées, la très belle sardana, el ball rodo et la bolangera mais on trouve aussi des traces de l'autre type. Quiconque observera l'exécution de ces danses sera, sur le champ, frappé de leur diversité. C'est ainsi que la danza prima asturienne est solennelle, lente, monotone et simple avec son unique pas qui rase le sol tandis que la sardana est allègre et d'un art raffiné. Ses pas brillants et d'allure seigneuriale exigent, des danseurs, une grande attention. La ronde ouverte de l'aurresku, où le rôle principal est tenu par les 2 danseurs qui occupent les extrémités de la chaîne, est mobile, elle exige de faire de grands sauts et s'accorde avec la vitalité et le tempérament inquiet et un peu fruste du peuple basque. La danse connue aux Iles Canaries sous le nom de isa est, elle aussi, une ronde. Cette danse a dû exister autrefois dans d'autres provinces d'Espagne comme l'attestent les jeux de cercle que les petites filles pratiquent encore.
     Mais la danse de divertissement par excellence, celle qui est la plus répandue en Espagne et qui fut toujours la mieux "sentie", est celle de pareja mixta enfrentada y suelta. En sustance, elle consiste tout simplement en ceci : Un homme se met en face d'une femme, à très courte distance. En dansant, ils se déplacent de droite à gauche et vice-versa, en exécutant les pas qui sont propres à cette danse. Il arrive généralement qu'en changeant de pas à un moment donné, le couple change respectivement de place (ce qu'on appelle passada et aussi cruce) pour reprendre la danse. Selon le genre de danse, la pasada peut être d'aller et retour et, dans ce cas, les danseurs reviennent à leur point de départ. La plupart des danses populaires entre couples se déroulent sur ce thème bien simple. Néanmoins, et malgré des recours si restreints, que d'aspects prend la danse, quelle variété, quelle richesse dans la contexture, dans les pas et dans l'esthétique...
     La place que choisissent les couples diffèrent déjà. La formation en file ou calle est la plus commune. Les hommes, en file, affrontent les femmes qui sont disposées de la même manière et, quelquefois, les 2 sexes alternent. Dans beaucoup de danses, on garde cet ordre mais il arrive que les 2 files se suivent et les danseurs marchent en rond jusqu'à ce que chacun occupe sa place initiale. dans certains cas, les couples dessinent un cercle. Les hommes alors, presque toujours, sont de dos à l'axe du cercle et font face aux femmes situées à l'extérieur. C'est la calle en rond qui, d'ordinaire, occupe toute la place du village. lentement, la ronde se meut dans un sens ou dans l'autre, les danseurs marchant de côté au fur et à mesure où ils marquent le pas. Dans d'autres danses, les couples se placent sur la circonférence idéale et de côté par rapport à l'axe. Ils restent alors sur place et exécutent les pas mais, sans que les femmes bougent, les hommes font des pas croisés et avancent jusqu'à ce qu'ils soient de front avec les danseuses les plus proches de chacun; ensuite, les couples, qui sont formés de nouveaux partenaires, répètent les mouvements de la danse. Il y a des danses où les 2 sexes exécutent les pas croisés. Dans ce cas, ils forment 2 ou plusieurs rondes de formes concentriques et parfois de file mais ils reviennent toujours à leur position intiale. Il arrive aussi que l'on combine, dans une ronde simple, les 2 positions que nous avons décrites.
     Comme il est facile de le supposer, ces danses sont des réminiscences des anciennes rondes symboliques. Dans d'autres, le cercle est rompu et l'on forme des figures en étoile ou en carré mais, à la fin, on le reconstitue. ce sont les danses de "cuadro" ou de "cuadrilla" avec un changement des couples par des pasadas ou en faisant une volte face.
     C'est surtout dans les jeux et les mouvements des pieds que l'on note une grande variété. Une danse, qui est compsée de 3 pas et qui se pratique dans 20 ou 30 villages, apparaîtra différente au moins dans la moitié des cas. Un ou 2 de ces pas auront changé ou on y aura ajouté un nouveau pas. beaucoup de danses ne comportent que 2 ou 3 pas mais souvent, ce chiffre est dépassé et certaines en comptent 10, 12, 15 et plus. Selon les cas, les pas frôlent le sol à une hauteur normale mais ils peuvent être compliqués de bonds, de sauts, de voltes sur un pied, de tours sur les 2 pieds, de demi-tours. Les jambes sont levées, droites ou repliées, sur les côtés ou derrière; on les croise en avant ou en arrière,, on lève l'un en avant ou en arrière sur le pied contraire, on frappe légèrement du talon, on avance sur la plante des pieds, sur la demi-plante ou sur les talons; on marche de front ou de côté dans toutes les directions tantôt doucement, tantôt énergiquement ou dans une posture raisie. Tels sont les traits, et bien d'autres, qui définissent la technique de la danse espagnole considérée dans son ensemble. Mais cela est d'un intérêt tout relatif. Le plus important est la multiplicité et la diversité des pas créés et leurs combinaisons qui donnent tant de variété à nos danses. En faire une relation complète est impossible mais il suffit de dire que toutes ces formes et des nuances permettent de découvrir les effets qui dérivent du caractère ethnique du peuple espagnol. Nous dirons encore que codifier ces danses serait une oeuvre formidable, ce qui permettrait de mesurer le génie créateur des Espagnols sur leplan de la chorégraphie et de stimuler la création d'un authentique national dont bénéficierait même la danses des autres peuples.
     Les catagnettes sont indispensables dans la plupart de nos danses mais on utilise également le claquement des doigts (hacer pitos) et cela suffit souvent. Les jeux de bras diffèrent selon les danses. Ils sont souvent croisés, légèrement recourbés en avant, mais sans rigidité. Les avant-bras pendent quelquefois et, dans les danses plus raffinées, ils dessinent de gracieux mouvements qui rehaussent l'exécution.
     Parmi toutes les danses que possèdent chaque région, il en est qui ont une place privilégiée parcequ'elles reflètent, peut-être mieux, le tempérament des habitants. Ainsi, en Galice, la muneira est au premier rang; dans les Asturies, la giraldikka; au Pays Basque, el arin-arin; en Navarre et en Aragon, la jota; en Catalogne, la sardana et le ball pla; Valence, la dança; à Murcie, la parranda; en Andalousie, la sevillana et le fandango; dans la Nouvelle Castille, las seguidillas manchegas et le rondon; en Estrémadure, le fandango et la jota, mais d'un style particulier; dans la province de Léon, la charrada, le charro et le corrido; dans la Vieille Castille, la rueda et les danses a lo alto et a lo bajo; à Mallorque, la mateixa et le bolero mallorquin; à Minorque, le fandango; à Ibiza, sa llarga; aux Canaries, las folias. Mais à côté de ces danses (sauf dans le cas de 4 ou 5), les variantes sont nombreuses; il y en a une foule qui ne sont pratiquées que dans de rares villages et certaines même ne sont connues que d'un seul endroit. Pour illustrer le 1er cas, prenons la province de Catalogne : Nous trouvons selon les lieux l'eixida, l'esquerrana, la espolsada, la corranda, les balls dels mocadors, dels aranyons, de punta y talo, de las morratxas, de San Ferriol, le patatuf, le contrapas xinxina, le ballet de Deu, la ratolinesa, le galop de cortesia, le ball cerda et bien d'autres encore. Citons, d'autre part, le village de Montehermoso dans la province de Cacérès, on y danse le son brincao, le pindongo, le quita y pon, le son llano, la pata, le malandrin, la charramanga; les 3 premières danses ne sont exécutées que dans le village que nous venons de citer; les autres, dans 6 ou 7 qui se trouvent aux alentours, le reste de l'Espagne les ignore. Et le même phénomène se reproduit dans beaucoup de régions; ce qui laisse à penser quelles sont la variété et la quantité des danses populaires espagnoles. On rencontre aussi des danses, mais plus rarement, où les 2 partenaires s'enlacent par la ceinture et où un seul danseur fait face à 2 ou 3 femmes.
     Il faudrait encore citer les belles danses d'école et les flamencas, qui, sans être au sens propre populaires, plongent leurs racines dans le peuple.

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